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Merci Monsieur Boiteux !
dimanche 1er août 2010, par

Marcel Boiteux est né en 1922, il est normalien agrégé de mathématiques, après un passage au CNRS, il entre à EDF en 1949, qu’il dirigera de 1967 à 1987.
À EDF, Marcel Boiteux a fortement pesé pour que l’on expérimente plusieurs filières nucléaires, alors que le prix du pétrole était ridiculement bas. De sorte que lors premier choc pétrolier en 1973, la France expérimentait à côté de la filière nationale à uranium naturel, et la centrale à eau lourde de Brennilis , plusieurs réacteurs à eau sous pression à uranium enrichi. C’est ce que Marcel Boiteux a défini sous le nom de gymnastique nucléaire.
Cette construction de compétences même sur une technique au départ conçue pour les sous-marins américains a permis de lancer très rapidement 3 à 8 tranches par an.
Les défis étaient importants : le cycle du combustible nécessitait une usine d’enrichissement dont le fonctionnement réclamait lui-même l’usage de 2 à 3 réacteurs. La normalisation pouvait entraîner des pannes en série, l’aval du cycle n’était pas encore défini.
Certes, certains reprochent à Marcel Boiteux, l’abandon des programmes sur des énergies alternatives, des normes d’isolation à 100 kWh/m2/an pour le chauffage électrique et les fragiles pompes à chaleur Perche.
Que voyons-nous aujourd’hui : des milliers d’éoliennes industrielles de 150 mètres de haut qui ne couvriront pas 10% de nos besoins en électricité, des photopiles à un prix encore exorbitant malgré 50 000 chercheurs sur le sujet dans le monde. Le chauffage électrique est toujours critiqué par les antinucléaires et pourtant c’est ce mode de chauffage qui a introduit les normes d’isolations les plus strictes, Marcel Boiteux a toujours insisté sur ce point. Même en n’étant pas encore au minimum accessible des 50 kWh/m2/an, le chauffage électrique chauffe quand même le tiers des logements avec seulement 10% de l’énergie consacrée au chauffage, quant aux pompes à chaleur air-eau efficaces, elles ne sont apparues que ces dernières années.
Les meilleures surprises viennent du parc REP . La standardisation, qui apparaît dans l’unicité des îlots nucléaires s’est révélée extrêmement efficace, elle a entraîné aussi l’unicité des programmes d’accompagnement : R&D, doctrine de conduite, formation des personnels, suivi du vieillissement etc...
Faisons les comptes :

En actualisant, les investissements annuels en euros 2010, on arrive à 80 milliards d’ euros pour 63 GW, soit à peine 1,3 € (2010)/W, ce qui est même en dessous de l’éolien terrestre irrégulier.
L’enrichissement par diffusion gazeuse, qui était un défi, a fonctionné et il est remplacé aujourd’hui par une technique 20 fois plus économe en énergie, la centrifugation qui permettra de libérer les réacteurs de Tricastin et d’exploiter l’uranium appauvri de 0,25% jusqu’ à 0,1% en 235 U.
Les réacteurs américains à l’origine du parc français, qui fonctionnent 90% du temps parce qu’ils ne subissent pas les variations saisonnières de consommation électrique voient leur durée de vie portée à 60 ans. Ce qui ouvre à nos réacteurs français qui ont des facteurs de charge de 75% des perspectives de longévité encore plus grandes.
Le stockage géologique des quelques milliers de m3 de déchets HA-VL et MA-VL a été validé scientifiquement depuis 2000.
Enfin l’approvisionnement à long terme en uranium naturel est assuré par l’extraction de l’uranium de l’eau de mer pour un surcoût d’à peine 4 c€/kWh.
Après 20 ans d’interruptions dans la construction de centrales nucléaires, les quelques retards sur les EPR de Flamanville et d’Olkiluoto, montrent que nous aurions bien dû nous inspirer de la gymnastique nucléaire. Et nous confirment dans l’idée que vous et vos collaborateurs avez fait un travail formidable à la tête d’EDF.
Donc Monsieur Boiteux : La génération X et les générations suivantes vous disent tout simplement et bien sincèrement : MERCI !
Messages
1. Merci Monsieur Boiteux !, 26 août 2010, 11:22, par un agent EDF
Un très grand patron, audacieux et visionnaire, non au service d’intérêts particuliers, mais au service de tous.
Que d’intelligence, de clairvoyance et de courage chez cet homme, dont l’avis est encore aujourd’hui écouté. Où sont les Boiteux d’aujourd’hui ?
Quel gâchis depuis 20 ans, avenc l’abandon de l’intérêt collectif au détriment du service aux actionnaires. Qu’avons nous fait de l’héritage de 1946 ?
Oui, merci, Monsieur Boiteux. Vous manquez à l’entreprise.
2. Quelques inexactitudes sur l’EDF d’aujourd’hui, 3 septembre 2010, 09:21
Pour info :
Civaux et Chooz (4 réacteurs de 1400mW, 3,5 EPR) ont été démarrrés vers 96 / 98... D’ailleurs étonnant que vous ne connaisiez pas assez le parc pour savoir qu’elles viennent de faire leur première visite décennale...
Entre temps, AREVA a payé la recherche de l’EPR, l’état ITER, EDF les modifications des centrales existantes.
on est encore loin des 20 ans sans investissements.
Sur le fond il n’ya rien de choquant à ce que les investissements soient plus lents aujorud’hui sur une techo mature et un pays avec un faible croissance des besoins.
Le coefficient de disponibilié des centrales américianes n’est pas du aux variations climatiques (marginale). C’est, de l’aveu même des directeurs du parc, du à la sous productivité d’eDF dans les arrêts de tranche, au Système d’Information de maintenance inadapté et de facon plus marginale aux contraintes reglementaires plus fortes en france. Il suffit de lire n’importe quel note de stratégie depuis 2005. C’est d’ailleurs pour cela que de nombreux benchmark ont été fait dans les années 2000 et ont mené à l’adoption de tout le dispositif de gestion "à l’américaine" : pilotage en 3*8, adoption des mêmes SI, processus de maintenance... pour plusieurs centaines de millions d’investissements.
Il y a même des présentation officiel où l’argument pour le financement de ces projets est "que malgré qu’EDF ait le plus grand parc et le plus standardisé, les centrales américaines sont plus performantes et bénéficient plus de leurs retour d’expérience commun."
La standardisation du parc et l’exploitant unique sont un échec selon EDF.
Je sais que ce raccourci (proriétaire unique et standardisation = performance) est fait systématiquement dans le milieu nucléaire mais si c’est EDF qui le dit...
Si vous êtes d’EDF, et si vous ne me croyez pas, les documents sont sur votre réseau... vous voulez un lien ?
Peut-être ce que vous dites sur les années 60 / 70 est vrai mais vu les inexactitudes sur aujorud’hui, cela me laisse comme un doute.
1. Quelques inexactitudes sur l’EDF d’aujourd’hui, 3 septembre 2010, 19:33, par PH
Les réacteurs de Civaux ont été été construits entre 1988 et 1998, le réacteur de Flamanville a débuté sa construction fin 2007 et sera terminé probablement vers 2014. Il y a bien près de vingt ans entre le début des deux constructions. La construction d’un réacteur passe par plusieurs étapes : BTP, pose du réacteur, pose des générateurs de vapeur, turbine, etc ... Si on compare les mêmes étapes, il y a bien près de vingt ans d’écart.
Compte-tenu de l’approche du pic pétrolier, nous aurions dû poursuivre la construction de réacteurs nucléaires, ce qui aurait maintenu une continuité de fonctionnement l’outil industriel et éviter les retards que nous connaissons sur Olkiluoto.
Jusqu’à aujourd’hui la moindre utilisation des réacteurs français par rapport aux réacteurs américains est bien due principalement aux variations saisonnières de consommation et à la composition particulière du parc français. Lorsqu’on a un parc majoritairement fossile, il est plus intéressant d’arrêter les centrales à charbon ; en revanche dans un parc majoritairement nucléaire (63 GW) lorsque la consommation passe de 60-90 GW en hiver à 40-60 GW en été, il faut nécessairement limiter la production nucléaire. Les cuves des réacteurs subissent donc un flux neutrons plus faible, ce qui augmente leur durée de vie.
J’ajouterais aussi que votre message est caractéristique des techniques de désinformation des antinucléaires (même si vous n’en étiez pas un) :
– refus des ordres de grandeurs : il y a certes toujours des investissements, mais ils sont négligeables par rapport à ceux nécessaires à la poursuite d’un programme nucléaire indispensable pour sortir des énergies fossiles.
– citation gratuite, absurde et non justifiée comme : « La standardisation du parc et l’exploitant unique sont un échec selon EDF. ».
– attaque injustifiée sur un point marginal : alors que cet article rendait hommage à Marcel Boiteux, président d’EDF jusqu’en 1987, qui a donc été responsable du choix de la filière REP et de la conduite de l’ important programme d’investissement (sur lequel repose la plus grande part du coût de l’électricité nucléaire), vous évoquez des gains sur les coûts de fonctionnement après 2000.
Expliquez nous donc avec des arguments sérieux et clairs comment vous auriez pu faire beaucoup mieux que 1,3 €/W .